Institut religieux de droit diocésain, la Communauté des Servantes de Jésus est fondée à Caen, en 1679, par le Révérend Père Louis Le Valois (s.j.) et Mademoiselle Elisabeth de Saint-Simon de Méautis. La naissance de l’Institut est une manière d’apporter une réponse directe aux maux et besoins de l’époque. La Communauté des religieuses est créée afin de venir en aide aux plus démunis, d’assurer le soin des pauvres et des malades recueillis dans l’Hôpital Général de Caen.
La création de l’Hôpital Général de Caen est envisagée dès 1655 par le Duc de Longueville, bailli de Caen. Elle est officialisée par lettre patente en 1656. Sa construction commence vingt ans plus tard, en 1676, en raison des lenteurs administratives de l’époque et à une succession de modifications du projet.
La fondation de l’œuvre commence par l’ouverture d’un Bureau des pauvres et un Dépôt de Mendicité. En attendant la construction de l’hôpital, les pauvres sont provisoirement installés à La Gobelinière.
L’objet de l’Hôpital Général de Caen, par définition ouvert à tous les pauvres, est élargi dès le départ. La volonté des administrateurs est de mettre l’accent sur les vieillards non valides et les enfants abandonnés. Les statuts sont approuvés par le Conseil le 17 juillet 1669. Ils sont enregistrés en mars 1674.
Le 16 août 1678, le gros pavillon accueille les premiers pauvres de la ville alors que les autres parties de l’édifice ne sont pas encore érigées. Ces dernières seront bâties à différentes époques, en fonction des ressources financières et de la reconnaissance de leur nécessité.
En septembre 1678, les administrateurs de l’Hôpital de Caen consultent leurs homologues rouennais pour tirer profit de leur expérience. Ils s’inspirent de l’organisation intérieure de l’Hôpital Général de Rouen, ouvert depuis quelques années, et choisissent de mettre une personne séculière et très charitable à la tête de l’établissement (les religieuses n'ont pas encore fait leur arrivée).
Plan de Caen, 1657, Jacques Gomboust
(Archives départementales du Calvados, 1 Fi 199)
Vue de l’Abbaye aux Dames de Caen en 1702, Louis Boudan
(Bibliothèque nationale de France)
Le Père Louis Le Valois, membre de la Compagnie de Jésus fondée par Ignace de Loyola et contemporain de Saint Jean Eudes, participe aux projets du Roi Louis XIV et de ses Ministres. Nommé professeur de Philosophie au Collège universitaire de Caen en août 1671, il contribue à la création de l’Hôpital Général de la Charité de Caen (plus tard appelé Hôpital Saint-Louis) et fonde la Congrégation des Servantes de Jésus, dont il rédigera les règles.
Né le 11 décembre 1639 à Melun, Louis Le Valois grandit en Bretagne avec sa famille. Il entre dans la Compagnie de Jésus le 14 août 1660. Sujet à de violents maux de tête, il est contraint d’abandonner le noviciat. Deux ans d’études à la Sorbonne lui permettent de se rétablir. Guéri de sa fatigue, Louis Le Valois s’engage de nouveau dans la Compagnie de Jésus. Dans le cadre de son noviciat, il est nommé Régent de lettre au Collège de Clermont, établissement au sein duquel il évolue six ans. Dans le même temps, il poursuit ses études des hautes sciences et sa vocation ne cesse de croître.
Louis Le Valois entre en Théologie en 1667. Il est ordonné prêtre en août 1670. En août 1671, sa formation terminée, il est immédiatement nommé Professeur de Philosophie au Collège Universitaire de Caen pour la rentrée.
Le Père Le Valois prononce ses vœux solennels le 15 août 1675. Nommé Recteur le 31 juillet 1678, il rend de nombreux services en dehors de l’exercice de son ministère.
Dévoué, profondément touché par la pauvreté qui frappe la Ville de Caen, le Père Le Valois visite et vient en secours aux pauvres et aux malades. Au milieu de ses nombreuses activités, il encourage la création de l’Hôpital Général.
Dans la même période, il forme Mademoiselle Elisabeth de Saint-Simon.
Fille spirituelle du Père Le Valois, la jeune femme, à la conduite exemplaire et à la charité remarquable, est pressentie pour régir la Maison et fonder une Communauté. Imprégnée de l’esprit évangélique, muée par son amour des pauvres, Mlle de Saint-Simon entreprend l’œuvre en juin 1679.
« Son humilité lui fit d’abord refuser cette dignité ; mais son amour pour Dieu, sa charité pour les membres souffrants de Jésus-Christ et son obéissance pour le Père Le Valois, son directeur, la lui fit accepter. »
La petite Communauté de départ est formée par le Père Le Valois et dirigée par Mlle de Saint-Simon de Méautis.
Elisabeth de Saint-Simon se met à la tâche avec courage et détermination. Elle débute sans aucune expérience de l’administration d’une telle institution. Aidée de quelques demoiselles, et secondée par le Frère Joseph, en charge du soin aux hommes, elle se dévoue corps et âme au service des pauvres.
Mlle de Saint-Simon donne le meilleur d’elle-même. Elle parvient à mettre en place une organisation régulière et stable dans son Institut. Le modèle de fonctionnement et de gestion qu’elle structure va amener la Congrégation à rayonner dans plusieurs Hôtels-Dieu de l’Ouest de la France (Rouen, Lisieux, Vire, Avranches pour les principaux).
Mlle de Saint-Simon prononce ses vœux en 1680. Elle est la toute première religieuse de la Congrégation nouvelle.
Il faut attendre 1714 pour que la Congrégation des Servantes de Jésus soit officiellement reconnue par l’Église.
Elisabeth de Saint-Simon de Méautis décède en 1716 après trente-sept ans de supériorat, au terme d’une vie éprouvante.